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Vos remboursements évoluent....

30/11/2016
Les assurés déjà passés sous le régime du nouveau « contrat responsable » découvrent que certains frais médicaux ne peuvent plus être remboursés.

Les assurés déjà passés sous le régime du nouveau « contrat responsable » découvrent que certains frais médicaux ne peuvent plus être remboursés.

Au départ, c'est une belle idée. Le nouveau « contrat responsable » de complémentaire santé doit garantir à chaque assuré un socle de protection basique, tout en mettant fin à la surenchère inflationniste sur certains remboursements. Mis en place en janvier, en même temps que l'obligation faite aux employeurs d'assurer tous leurs employés, il commence à se développer.

Or malgré la modération tarifaire imposée aux mutuelles, ces nouveaux contrats font grimper le reste à charge de certains assurés, ceux qui étaient plutôt bien protégés dans le cadre de contrats en entreprise. C'est ce que montrent les données relevées par le courtier en assurances Mercer, qui a mené l'enquête auprès de ses propres adhérents : 1,3 million de contrats en entreprise, dont 70 % ont souscrit l'un de ces nouveaux contrats.

Interdiction de rembourser les dépassements d'honoraire

« Depuis janvier, nous avons reçu une vague d'appel de gens qui ne comprennent pas pourquoi ils ne sont plus remboursés chez leur médecin », expose Vincent Harel, directeur adjoint santé et prévoyance chez Mercer. En effet, le contrat responsable s'est combiné avec le contrat d'accès aux soins (CAS), créé en 2013, qui compte un peu plus de 11.000 médecins signataires. Pour bénéficier d'un remboursement de la part complémentaire de sa consultation médicale, l'assuré doit consulter chez un médecin qui pratique peu de dépassements d'honoraires : s'il est en secteur 2 (honoraires libres), il doit soit être signataire d'un contrat d'accès aux soins (dépassements limités), soit pratiquer des dépassements 20 % moins élevés que le maximum autorisé pour les signataires du CAS.

Or seuls 27 % des médecins de secteur 2 sont signataires du CAS. Les autres n'ont pas voulu se contraindre à facturer moins de 46 euros la consultation chez un spécialiste. Notamment dans les grands centres urbains, où l'immobilier coûte cher, et où les dépassements d'honoraires sont importants sur les spécialités les plus tendues  : médecine générale, ophtalmologie, gynécologie... « L'économie du médecin n'est pas la même à Plouermel et dans le VIIe arrondissement de Paris », résume Vincent Harel. Ce dernier pointe le cas de malades souffrant d'un cancer, « remboursés plein pot en 2015 sur leur traitement, mais qui ne peuvent pas s'offrir la reconstruction car leur chirurgien pratique des dépassements ». Seuls 15 % des chirurgiens ont signé un CAS.

Résultat, les restes à charge explosent chez certains assurés, qui n'avaient pas anticipé les effets de bord du maelström réglementaire survenu depuis l'arrivée de la gauche au pouvoir. En moyenne, chez Mercer, le reste à charge des assurés passés au nouveau contrat responsable est passé de 8,40 euros à 16,90 euros sur les honoraires d'hospitalisation, de 2 à 4,60 euros chez un spécialiste. Dans le même temps, le pourcentage d'actes sans reste à charge a chuté de 5,5 points à 90 % en hospitalisation, et de 12 points à 75 % en consultation de spécialistes. Ce n'est que le début. « Il y a un effet retard, car de nombreux salariés ne basculeront qu'entre janvier 2017 et janvier 2018 », explique Vincent Harel.

Certains patients renoncent à leur médecin

Certains assurés pâtissent aujourd'hui des plafonds de remboursement du contrat responsable, mais on peut espérer à moyen terme que les consultations coûtent moins cher. Cela permettrait d'accroître l'accès aux soins. Cependant, selon Mercer, les médecins non-signataires d'un contrat d'accès aux soins ne se sont pas adaptés à la nouvelle donne assurantielle en abaissant leurs tarifs. Seuls 4 % d'entre eux l'ont fait entre 2014 et 2016.

Ce sont plutôt les assurés qui commencent à modifier leur comportement. Entre 10 % et 15 % de ceux qui payaient leurs consultations plus de 46 euros entre 2010 et 2015 étaient passés chez un médecin moins cher en 2016 - peut-être pour d'autres raisons que le contrat responsable, d'ailleurs. Les auteurs de l'étude notent aussi que les honoraires des chirurgiens dans les établissements privés (lucratifs ou non) ont reculé de 20 %, probablement parce que des patients ont renoncé à s'y faire soigner. « La soupape d'ajustement, c'est l'assuré, et non les professionnels », souligne Vincent Harel.

Des surcomplémentaires parfois obligatoires

Il n'est donc pas dit que l'accès aux soins va s'améliorer, car avec une population de médecins qui rétrécit, des déserts médicaux qui gagnent partout sur le territoire, les patients ont peu de choix. En revanche, la révolution du contrat responsable devrait être bénéfique pour les assureurs : même si leurs primes ont baissé, ils remboursent nettement moins de dépenses. « Les contrats de santé en entreprise étaient déficitaires, ils vont pouvoir s'équilibrer », estime Vincent Harel.

Pour le fisc, ajoute-t-il, ce devrait être une bonne opération. Car les contrats « non-responsables », ceux qui offrent plus de garanties que le panier de soins des contrats responsables, sont taxés à 20,27 % au lieu de 13,27 %. Or 60 % des adhérents de Mercer souscrivent une surcomplémentaire, souvent non-responsable. Le prix moyen est de 20 euros par mois, soit presque un doublement par rapport au prix moyen acquitté pour le panier de soins obligatoire (25 euros).

« Les cols bleus souscrivent plus d'options que les cols blancs, car ils ne peuvent pas se permettre une volatilité de leurs dépenses de santé », pointe Vincent Harel. Les grandes entreprises poussent elles aussi ces contrats surtaxés. Certains employeurs ont même introduit des surcomplémentaires non responsables obligatoires, afin de maintenir le niveau des avantages acquis.

Source : Les Echos 29/11/2016